The Whole Show
EDOUARD MONTASSUT
La pratique de Clément Caignart se développe autour des formes d’émancipations possibles dans nos sociétés capitalistes modernes. Une question qui n’a de cesse d’être ravivée quand l’avènement du travail immatériel, celui qui prend forme derrière nos ordinateurs et via les réseaux sociaux, apparait désormais comme le nouvel avatar de l’esprit capitaliste. Une matière neuve à spéculer pour les philosophes contemporains.
C’est donc à partir d’un appareillage théorique dense que l’artiste convoque habilement Moishe Postone ou Guy Debord pour décrire certaines spécificités des mécanismes de production et des formes de conscience nécessaire à la lecture des enjeux entre subjectivité et rapports sociaux. À l’occasion de son diplôme intitulé The Whole Show n°4 (2013), il présente une installation immersive dans laquelle il (re)détourne quelques-uns des symboles de l’esthétique situationniste (de l’affiche au slogan populaire, du collage au cinéma expérimental) en les recontextualisant par un renversement dans l’espace d’exposition. Dans une approche que l’on pourrait qualifier de « stéréoscopique », textes, images et sons s’articulent de manière à mettre chaque régime visuel et discursif en vibration ; tous ces éléments fonctionnant moins par addition que sous la forme d’apparitions simultanées, telles des injonctions : “DES FAUX-PAPIERS POUR TOUS” ou “Inexploré, changez votre réalité”.
Le travail de Clément Caignart vise à problématiser la prise de conscience. Celle d’une situation donnée, et notamment d’un rapport du sujet à son environnement. Outrepassant la critique lancée contre les avant-gardes surréalistes de ne faire la révolution que dans leurs têtes, l’artiste répond ici en déversant ses formes dans une urgence perturbante.